En plus de soutenir les entreprises, les autorités doivent-elles distribuer de l’argent directement aux individus, pour aider l’économie à traverser le trou d’air créé par le coronavirus ? Je vous invite à lire l'article de Sébastien Ruche sur le concept de l'hélicoptère monétaire. A mon avis, le principe de l'arrosoir permet d'avoir "bonne conscience" mais passerait à côté des entreprises les plus touchées par la crise et qui seront le moteur pour le redémarrage de l'économie. Il a beaucoup été question de soutien aux entreprises ces dernières semaines, au fur et à mesure que différents pays tentaient de contrecarrer les effets de la pandémie de coronavirus. Un autre moyen de soutenir l’activité économique consiste à distribuer de l’argent directement aux ménages, dans l’optique de relancer la consommation. Ce concept d’«helicopter money» a été discuté à de nombreuses reprises suite à la crise financière de 2008, et Hongkong l’a mis en pratique fin février, à hauteur de 1200 francs par individu. Un modèle pour la Suisse, alors que le Conseil fédéral a annoncé vendredi de nouvelles mesures pour contenir le virus ? Cédric Tille n’est pas contre l’idée de distribuer de l’argent aux ménages. Pour autant qu’ils puissent le dépenser, nuance le professeur au Graduate Institute de Genève, «ce qui est difficile lorsque les commerces sont fermés comme c’est le cas en Italie». Face à la crise sanitaire, l’objectif consiste surtout «à passer le trou d’air» déclenché par la baisse de la consommation «et à éviter que l’économie ne soit un champ de ruines, avec des entreprises fermées et un chômage en hausse, une fois que l’épidémie sera passée», poursuit Cédric Tille. Financement d’Etat possibleL’économiste estime qu’une distribution d’argent aux ménages pourrait leur permettre de faire face à leurs dépenses incompressibles pendant le ralentissement économique. Il souligne qu’un outil efficace existe déjà en Suisse pour faire face à ces moments difficiles: le chômage partiel, pour lequel les délais de postulation ont été abaissés par le Secrétariat d’Etat à l’économie. Enfin, un soutien direct aux entreprises peut également être nécessaire, calibré selon les secteurs d’activité. Il ne s’agit pas seulement de mesures liées au coût du travail (report des cotisations sociales par exemple): «Des aménagements sur le remboursement des hypothèques peuvent être envisagés à condition de ne pas reporter le coût uniquement sur les banques, qui sont déjà sous forte pression; un financement d’Etat est tout à fait possible en Suisse, la marge existe pour augmenter un peu la dette publique, qui serait remboursée en quelques années grâce à la croissance économique.» Possible sans changer la loiSortir l’hélicoptère à argent permettrait une réponse robuste aux difficultés conjoncturelles actuelles car «l’argent distribué compenserait la faiblesse de la demande dans les secteurs où cela reste possible», enchaîne Michaël Malquarti, très impliqué dans les questions d’ordre monétaire. Reste à savoir comment effectuer un tel transfert de richesse vers les particuliers: «Contrairement à ce qu’on entend souvent, un changement du cadre réglementaire ne serait pas forcément nécessaire en Suisse, détaille le gérant de portefeuille chez Quaero Capital. La Confédération peut déjà distribuer directement de l’argent, comme cela s’est fait à Hongkong, et s’endetter pour cela. Ce serait un moyen de répondre à l’urgence du moment.» Une autre voie passerait par la Banque nationale et ses réserves pour distribution future: «Ces capitaux sont censés être utilisés pour lisser les aléas de la conjoncture, or la BNS a tendance à les distribuer selon ses revenus. Elle pourrait tout à fait décider de transférer plusieurs milliards en une fois à la Confédération et cette dernière les donnerait à la population, à travers les caisses maladie, puisque chaque citoyen suisse possède une assurance maladie.» Au-delà de cette mesure ponctuelle, il milite pour une réforme du système monétaire actuel, «qui est peu efficace et qui crée des instabilités», une idée décrite dans son livre Pour un nouvel ordre monétaire, publié en 2018. Source Le Temps vendredi 13 mars 2020 Sébastien Ruche
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